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Formations - témoignages


Bilan personnel de la formation longue avec Terres Tantriques
« Conscience, fluidité » - octobre 2012 – mai 2013

Chemin personnel : en quoi la formation m'a aidé
La formation m'a permis de faire des pas importants sur deux terrains difficiles pour moi.
Le premier, c'est celui d'une histoire d'amour longue, belle et compliquée. Au début de la
formation, cela faisait presque huit ans que je me tournais et retournais dans une relation avec un
homme, dans laquelle je me perdais autant que je me retrouvais. C'était un « lien », extrêmement
vivant et qui n'a eu de cesse de grandir en solidité, en justesse et en subtilité, mais qui n'était
reconnu ni dans son essence d'amour ni dans une forme sociale. Amis intimes, mais officiellement
rien d'autre. La qualité de ce lien justifiait mon choix, conscient, de renouveler à chaque fois la
rencontre, mais c'était au prix de beaucoup d'énergie et souvent d'une grande tristesse.
La pratique du tantra, par l'élargissement de mon horizon et par l'approfondissement de l'expérience
que j'ai de mon corps et de mon désir, m'a permis de mieux me définir et de mieux distinguer les
éléments qui sont réellement singuliers à cette relation et à cet homme, et ceux qui relèvent
davantage de ma propre manière d'être, et que je peux donc retrouver ailleurs. Ce qui a relativisé
mon attachement à lui, m'en a libérée, mais lui a donné aussi un ancrage plus solide.
Au sein de la formation, plusieurs structures m'ont été plus particulièrement aidantes.
La méditation active « couper les liens » m'a montré un chemin de libération de la part de
dépendance que contenait ce lien particulier; elle m'a permis de le visiter à la lumière des différents
chakras, de mieux le comprendre. Et paradoxalement, cela ne l'a absolument pas coupé, mais
enrichi et approfondi.
Lors de « Noble yin noble yang » j'ai senti, dans une structure, donc dans un cadre, qui à la fois
protège et sert de loupe grossissante, comment je peux participer à des mécanismes pervers ou de
manipulation. J'ai pu voir clair, j'ai pu élaborer mon ressenti jusqu'à une parole construite et vous
m'avez offert le temps, l'espace et l'appui dont j'avais besoin pour dire cette parole à mon partenaire
de structure - qui dans la vie réelle est un ami signifiant pour moi. C'était un véritable travail de
désintoxication qui a heureusement clarifié et fait grandir cette relation d'amitié.
Mais aussi, comme par magie, il a été agissant dans mon « lien » de cœur. Dans la semaine qui a
suivi cette session du stage y sont advenus la reconnaissance de l'amour et de l'existence d'un
« nous ». Cela ne signifie ni couple, ni alliance officielle et publique. Mais désormais, nous tâtonnons ensemble pour donner une forme, hors catégories classiques, à notre lien, aussi bien dans le social que dans l'intime, et cela est une véritable révolution : merci la formation !
Le deuxième terrain où la formation m'a aidé à faire des pas importants est celui de mon « être au
monde » social. Elle a coïncidé pour moi avec la fin d'un long parcours d' »émancipation » (au sens
très large) qui a compris, au fil des années précédentes, des stations de type « crise de la
quarantaine », « thérapie et travail sur soi », « séparation », « reconversion professionnelle »,
« déménagement », « renouvellement de réseaux ». Petit à petit j'étais (et je suis encore) en train de
sortir d'un grand enfermement que j'ai moi-même construit avec bonheur et inconscience pendant
vingt (si ce n'est presque cinquante) ans. J'avais parcouru déjà pas mal d'étapes sur ce chemin par le
travail sur le souffle et la voix et par d'autres moyens thérapeutiques : celles d'entrer en contact
avec mon être profond , de prononcer un « non » fondateur, d'oser l'émotion ; j'avais commencé à
rendre vie à mes sensations et mon corps de femme. Mais tout cela restait encore à l'intérieur ; la
formation m'a fait travailler mon « coming out », à prendre conscience de mon rayonnement dans le
monde. Et à en assumer ma responsabilité.
La structure de la forteresse, que j'ai pu rejouer dans la structure de libre choix en l'adaptant à ma
difficulté propre (je l'ai refaite yeux ouverts et en opposition active à la sollicitation), a eu une
valeur de guérison en m'autorisant de créer une situation de régression. J'ai senti et compris à quel
point mon enfermement a été mon propre œuvre, et combien j'ai pu dépenser ma force à
m'anesthésier, à me cacher et à fermer les yeux. Sur le trône de qualités j'ai entendu ce que d'autres
perçoivent et reçoivent de moi ; j'ai dû constater que ce que je pensais comme étant « encore
enfoui » est en fait déjà là. La structure où l'on se présentait dans le cercle du sexe opposé m'a
aidée, grâce au regard aimant des hommes, à me voir en étant vue, et ainsi à me rendre visible à
moi-même. Enfin, le chant que j'ai offert au groupe sur votre invitation a symboliquement résumé
mon chemin, en permettant à la vie de couler de nouveau dans ma lignée paternelle.
Enseignements : en quoi la formation m'a marquée
Je crois que ce qui me reste de plus précieux de ces quatre sessions est l'idée que l'essentiel est tout
petit.
J'aime énormément la « micro conscience », la conscience qui se pose sur les micro instants les plus
communs de la vie quotidienne. C'est cela qui m'a aidé à commencer à intégrer le tantra dans la
vraie vie.
J'ai aimé au départ l'idée de remplacer le jugement par l'observation ; cela allait bien avec une forme
de bienveillance et d'ouverture du cœur ; c'est un outil efficace d'aide à toute détresse.
Ensuite, j'ai commencé à apprivoiser l'attente, la version projective de ce jugement. Au sein du
« lien » dont j'ai parlé ci-dessus, j'avais appris ce que cela signifie de ne rien attendre d'une rencontre, de la laisser vivre avec ce qui est là.
La formation m'a aidé à élargir cette compréhension à l'ensemble de la vie, de concevoir plus clairement qu'on peut vivre en laissant tomber le souhait d'une forme préconçue. Il n'y a pas de bon à atteindre ni de mauvais à éviter.
Puis j'ai saisi qu'il n'y a même rien à laisser tomber et cela devient encore plus puissant . Le bon et
le mauvais existent, le souhait, le jugement et l'attente font partie de la vie. L'instant du baiser que
j'attends, ou celui de la parole que je redoute, est fondamentalement équivalent à celui où je regarde
mon voisin dans le métro sans le voir. Mais chacun de ces instants a un goût particulier.
Et c'est de goûter qui rend vivant, pas la nature du goût.
Et après avoir goûté, je suis libre de choisir si je mange.
D'un côté je peux donc étaler les pics de sensation et démultiplier l'intensité de ma vie. De l'autre je
peux choisir de m'élever dans le sublime ou de plonger dans le douloureux et faire œuvre de
création avec ces instants qui du coup deviennent particuliers.
Plus je pénètre ces notions, plus je suis impressionnée par la puissance de levier et par l'ampleur de
leurs implications.
Parce que d'avoir goûté laisse libre, et même, cela rend plus libre. Libre de choisir, et responsable de
dire oui ou non.
Ce qui m'amène à un autre enseignement pour moi : la prise de conscience de la difficulté ou plutôt
de l'importance du choix.
Au départ de la formation, le choix, et plus précisément les situations de choix de partenaire, ne me
posaient pas de difficultés. Je me sentais dans une ouverture et une appétence de la rencontre sans
freins ni appréhensions majeurs. Tantôt j'ai choisi, tantôt j'ai laissé faire et cela a toujours été bon.
Or, c'est à la fin des quatre séances que la vraie difficulté à commencé à se poser. Avec une
connaissance de tous ces gens, cela devenait bien plus difficile de garder la même disponibilité à la
rencontre. La neutralité du départ s'est chargée de valences : plus d'élan par ci, moins par là. Et il
s'est posé la question des liens dans le temps : lesquels est-ce que je vais soigner, lesquels vont
s'éteindre tout seuls ? Comment garder l'ouverture à tous, tout en choisissant d'investir mon temps
et énergie de vie avec l'un(e) et pas ou moins avec l'autre ? J'en retiens qu'il est aussi important de
choisir que de laisser venir. Et qu'ouverture n'est pas neutralité.
La question du choix est très proche de celle de la balance vraiment subtile entre la conscience de ce
qui est, et l'initiation de ce qui peut advenir. Question fondamentale aussi bien dans la vie que dans
l'accompagnement thérapeutique, et qui me touche donc aussi bien personnellement qu'en pensant
au positionnement professionnel que je suis sur le point de prendre. L'enseignement reste ici sous
forme de conscience de la délicatesse de la question ; agir ou ne pas agir ? Donner forme ou
accueillir ? Choisir ou accepter ce qui vient ? On l'a abordé en parlant de Tandava et j'ai senti alors
à quel point on touche ici à la crête des deux versants : quand est-ce que j'attends que les bras se
lèvent seuls, ou ne se lèvent pas, et quand est-ce que j'y mets un brin de mon élan propre pour
chercher un possible qui m'attire ?
Par rapport à la même question appliquée à la conduite du thérapeute, j'ai été marquée par la phrase
de Dominique : « avant de parler, qui parle ? ». Je fais le vœu que je puisse apprendre à pratiquer ce
petit stop, moi qui parle peu mais parfois bien trop ou trop vite.
Dernier enseignement que je retiens, mais qui rejoindrait bien le premier : le « oui » et le « non »
sont à penser tout petit petit petit. Et dans une dynamique, non pas une statique ; non pas un état qui
est forcément susceptible d'être nuancé ou discuté, mais un mouvement, une direction de
mouvement, saisis sur le vif du vivant.
Le dispositif : qu'est-ce qui fait que cela a marché pour moi ?
En résumé, la formation m'a donc aidé et j'en ai retenu des choses : quels éléments ont été
opérants ?
Au-delà du contenu de certaines structures et des paroles prononcées, ce qui me semble primordial
est d'avoir disposé d'un espace d'expériences très large dans un cadre simple mais essentiel. J'ai
aimé la confrontation avec les énergies d'hommes et de femmes différent(e)s, et cela a été apprenant
de me rencontrer chaque fois autrement et pourtant pareille dans ces deux à deux différents. Il est
efficace de pouvoir « s'essayer » avec huit hommes (et sept femmes) dans un temps limité, et dans
l'espace de sécurité, de liberté et de créativité qu'induit la règle de non pénétration.
Dans un deuxième temps j'ai perçu que l'existence du cadre avait aussi comme intérêt de créer un
espace hors cadre mais sous le parapluie de celui-ci ; cela m'a permis d'étendre l'expérimentation
dans la vraie vie.
Le deuxième élément opérant a été le travail en groupe. J'ai observé comme certains (et surtout
certaines) savent s'en saisir à bras le corps comme outil pour labourer et défricher. J'ai vu comme
d'autres restent dans une observation quasi extérieure mais qui s'avère agissante quand-même, chose
qui m'a beaucoup impressionnée. Cela me donnerait envie de faire un autre groupe, rien que pour
revoir ces changements quasi souterrains de nouveau à l’œuvre.
Pour ma part, je me compte plutôt dans la deuxième catégorie, mais je suis contente d'avoir su à
deux reprises faire vraiment appel au groupe pour m'appuyer sur cette entité vivante en dehors de
moi. Je me félicite d'avoir su demander de l'aide et d'avoir su prendre une place dans ces moments
de travail dans le cercle.
Et last but not least, le troisième élément c'est bien vous, nos chers formateurs.
A cause du soin que vous avez apporté au cadre matériel « cocon », aux décorations, aux objets et
outils rituels ; cela s'est vu quand on a vidé la salle … Et si je commence par là ce n'est pas parce
que c'est le truc matériel le moins important, je crois même que c'est tout le contraire. (Lisez Tobie
Nathan et ses propositions sur les dispositifs thérapeutiques du monde entier ;))
A cause ensuite de la correspondance entre les méditations proposées et l'enseignement ; les unes
mettent en forme corporelle et spatiale ce que l'autre saisit en paroles, et le tout fait office de
symbole pour ce qui se passe au quotidien dans la vie ; ces aller-retours ont pour moi force de
métaphore et m'aident beaucoup à « saisir » et faire sens.
A cause aussi de la cohérence globale entre le dispositif que vous avez créé, son contenu explicite,
et votre être personnel. Je pense même, et je vous l'ai déjà dit, que vous pouvez encore aller plus
loin dans cette cohérence et être vous-mêmes sans chercher à maintenir une certaine réserve liée à
l'idée de la « juste distance » du thérapeute. Cette notion de distance appartient à un modèle
théorique, psychanalytique, qui est fondé sur une asymétrie entre thérapeute et patient, l'un
s'effaçant de la relation réelle pour recevoir les projections de l'autre et ensuite être en position de
les interpréter, ce qui est très proche d'un savoir « sur l'autre à la place de l'autre ». Elle est
compréhensible aussi dans toutes les thérapies où le thérapeute fait alliance avec le divin sous toutes
ses formes et où l'efficacité thérapeutique vient de l'inversion d'expertise : pour guérir, le patient
doit être dépossédé de « sa théorie » de l'origine de son mal et adopter celle du thérapeute. Mais
dans la vision humaniste de l'accompagnement, que vous incarnez, consciemment ou non, et qui se
caractérise par le postulat que l'expert est la personne souffrante elle-même, le thérapeute est
fondamentalement sur le même plan, humain, que son patient ; il a seulement avancé un peu plus
sur un chemin de conscience et il s'est doté d'outils pour assumer une fonction d'accompagnateur.
Dès lors, le cadre ne se garantit plus par la distance mais est porté par le thérapeute à l'intérieur de
sa manière d'être Il me semble qu'alors la capacité à se montrer « comme tout le monde » en
partageant ses joies, ses peines et ses doutes renforce la cohérence de la proposition d'ensemble. Ce
qui ne veut pas dire que je vous incite à vous déverser et à abandonner une saine prudence
protectrice, mais que c'était bon de vous entendre parler de vous lors de la dernière séance et que
cela aurait pu se faire plus tôt.
Et enfin, tout cela marche à cause de votre présence, de votre finesse, de votre sens du temps et de
l'attention nécessaire aux choses et à la confiance que vous avez fait naître entre nous.
Je vous embrasse toutes et tous,
S. 4 juillet 2013

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